Tout savoir sur la dépression et le burn out au travail
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#MPBP (Mon P’tit Boulogne Plus) : Selon l’OMS, la France arrive au 3ème rang des pays recensant le plus grand nombre de burn out au travail. Le burn out, de quoi s’agit-il ?
Dr Anne-Caroline Henriot : C’est un syndrome d’épuisement moral. On l’observe chez des personnes ayant vécu une longue période de stress chronique. Celle-ci est souvent d’origine professionnelle. Ces personnes ne peuvent plus travailler, voire même se lever, leur corps dit stop… Irritabilité, changements d’humeur rapides, réveils nocturnes, perte de motivation, difficultés à s’investir émotionnellement auprès de ses proches…
Ce syndrome, depuis qu’il peut être diagnostiqué, aurait déjà touché plus de 100 000 personnes en France. Et plus de 3 millions seraient à risque. Une occurrence plus spécifique chez les perfectionnistes, ceux qui se mettent la barre haut, avec un rapport au travail très structurant.
La particularité de ce syndrome est que l’on se souvient du jour où l’on s’effondre. C’est une rupture totale avec son mode de vie d’avant qui intervient du jour au lendemain. On le sent venir mais la personne qui vit cette rupture progressive est souvent dans le déni. En effet, la cause est aussi pour elle un moteur de vie, qui progressivement devient néfaste. Mais elle ne peut s’y résoudre, n’ayant d’autres alternatives que de continuer.
#MPBP : Quelles sont les causes de cette pathologie ? Quels sont les signes précurseurs ?
A-C Henriot : On pense à tort que le burn out est uniquement d’ordre professionnel, or il est multifactoriel. Cependant, la principale cause est en effet le stress professionnel. Nous passons plus de 30% du temps passé au travail, et les organisations en demande beaucoup à de leurs équipes. Depuis 1995, les conditions de travail se sont complexifiées face à une concurrence de plus en plus dynamique. Le management suit aujourd’hui deux tendances :
- Celle du leader charismatique et magnétique auquel on veut ressembler.
- Le management par la peur, qui a pour objectif de sortir les salariés de leur zone de confort. Il veut les stimuler et les rendre plus créatifs. On instaure le changement comme mode de gestion permanent (évolution des procédures, augmentation progressive des objectifs, plans sociaux, réorganisations des postes et des missions, etc) et le salarié devient alors un débutant au quotidien.
Cette perte de repères poussée à l’extrême – associée à un manque d’autonomie et de soutien hiérarchique – peut avoir des effets néfastes. C’est le cas notamment en termes de performances professionnelles et d’estime de soi. Ils conduisent souvent à un isolement (l’entraide entre collègues disparaît) avec pour conséquence ultime une « explosion interne » communément appelée Burn Out. Mais avant le burn out, il y a des signes avant coureurs…
En 1er lieu, des difficultés de concentration, des pertes de mémoire, de la fatigue qui résiste au sommeil. Puis, quand le stress chronique s’installe, on observe des problèmes d’atopies cutanées (eczéma, psoriasis), digestifs (troubles du comportement alimentaire, diarrhées,…), des migraines voire des malaises. Enfin, dans les stades ultimes, on observe presque systématiquement des troubles du sommeil et un syndrome d’épuisement qui s’installe progressivement. Cela se traduit par des sautes d’humeur, une anxiété permanente, du surmenage, la perte du désir…
#MPBP : Comment prévenir et traiter le burn out ?
A-C Henriot : Pour le prévenir, il faut opter pour un mode de vie équilibré entre vie professionnelle et vie privée. Il faut avoir un rapport au travail sain. 3 approches complémentaires ou individuelles :
- Se recentrer & prendre du temps pour soi. Sport, sophrologie, méditation, yoga, massage, ou s’adonner à ses passions pour sortir du quotidien et se recentrer. On y va à fond sur le jardinage, les balades en forêts, la plongée sous-marine en piscine ou ailleurs…s’ancrer dans l’instant présent et ne plus avoir peur de demain ou regretter hier…
- Apprendre à gérer le stress. Prendre du recul grâce à la psychothérapie, ou apprendre à gérer ses émotions (analyse transactionnelle, hypnothérapie, coach sportif…).
- En dernier lieu, avoir recours à des solutions pharmacologiques, des médicaments (anxiolytiques et antidépresseurs) ou des compléments alimentaires d’origine naturelle. Ces derniers sont sans effets secondaires, ni accoutumance. Mais toujours avoir au préalable recours à l’avis d’un professionnel de santé afin de définir la solution la plus adaptée. Chaque cas est unique !
Quand il est trop tard, on recommande de couper le lien avec la cause principale : consulter son médecin généraliste pour la marche à suivre – en général arrêt du travail accompagné d’un soutien thérapeutique – traitement allopathique ou naturel – et voir un neuropsychologue avec lequel vous pourrez faire un bilan et évaluer votre niveau de burn out. Un accompagnement par la parole est indispensable, pour « évacuer », poser la réflexion et à terme, faire évoluer son système de valeur – le rapport au travail doit changer pour s’en sortir.
Il y a une vie après le burn out, l’après n’est pas l’avant, il faut accepter d’en passer par une phase d’introspection et de mutation profondes pour s’en sortir et vivre mieux. Parce qu’il s’agit en effet de « changer le disque dur » pour être plus heureux. Et si l’on allait chercher du côté de la slow life pour changer de vie ?
#MPBP : Que peut faire l’entourage?
A-C Henriot : L’entourage, les proches peuvent écouter, accueillir la souffrance de l’autre, mais il est très difficile pour un tiers ne l’ayant pas vécu de comprendre le vide ressenti. Donc nul besoin d’essayer de trouver des solutions à court terme, il faut surtout l’accompagner sur le chemin de la rémission en l’écoutant et l’orienter vers des professionnels compétents.
#MPBP : Comment aborde t-on un retour à l’emploi après un burn out ?
A-C Henriot : 80% des patients retrouvent un emploi, mais pas dans les conditions d’exercice passées : pas le même employeur, pas les mêmes collègues ni le même poste, trop difficile en effet de retrouver l’environnement qui vous a fait chuter. Si le salarié est en arrêt maladie, il pourra, pendant cette période, réaliser un bilan de compétences et une formation qui lui permettront de rebondir au moment du retour à l’emploi.
La psychothérapie va aussi aider à prendre du recul et laisser émerger de nouvelles envies…Il faut pendant cette période réaliser une réelle introspection pour trouver une nouvelle voie.
#MPBP : Y a -t-il des associations de soutien, oùtrouver des solutions ?
A-C Henriot : D’excellentes associations existent en effet, notamment « Souffrance et travail » (www.souffrance-et-travail.com) créée par Marie Pezé, qui donne beaucoup d’informations pour vous aider au niveau social, juridique, etc.
Nous travaillons en partenariat avec « AssoSPS » (www.asso-sps.fr), une association dédiée aux professionnels en santé en burn-out, avec une hotline dédiée 24h/24 à l’écoute de cette population particulièrement touchée (médecins, infirmiers, pharmaciens, aides soignants…).
Il existe enfin des associations régionales favorisant l’écoute des personnes touchées, notamment « Parlons Travail » (www.parlonstravail.info).
Retenez surtout que le burn out au travail n’est pas une fatalité. De nombreuses sociétés qui ont pris conscience du problème et l’anticipent. Elles font appel à des consultants spécialisés dans la prévention en replaçant l’individu au coeur des organisations (www.betterhuman.fr).
Docteur Anne-Caroline Henriot – NMC Lab